Depuis quelques années, le chômage est devenu monnaie courante pour les jeunes qui terminent leurs études secondaires et universitaires au Burundi. Bon nombre d’entre eux gardent le rêve d’être embauchés après leurs études ou d’être affectés à une fonction publique. Toutefois, les autorités burundaises ne cessent pas d’inviter la population burundaise, en général, à se regrouper en associations et les jeunes diplômés, en particulier, à se créer de l’emploi, car ils ne peuvent pas être tous embauchés dans la fonction publique.
A l’heure actuelle, des jeunes ont répondu à cet appel en créant des emplois et certains arrivent même à donner de l’emploi aux autres. Ils demandent d’être soutenus par le gouvernement ou d’autres bienfaiteurs pour consolider leurs projets.
Au cours de notre entretien, le représentant légal de l’entreprise Kirumara costos company (KCC), Pascal Ndayizeye, a indiqué que c’est à partir des discours et des séances de sensibilisation des jeunes à se créer des emplois, organisées par les autorités burundaises qu’il a eu l’idée de créer cette entreprise. « Je me suis dit qu’il ne faut pas tout attendre de l’Etat, mais plutôt, de m’organiser afin de me créer de l’emploi et d’appuyer le gouvernement dans sa politique d’amener les jeunes à changer leur mentalité. Il s’agissait aussi de pouvoir me développer et donner de l’emploi aux autres jeunes. C’est pourquoi j’ai décidé d’exploiter mes dons pour créer de l’emploi, afin que beaucoup de jeunes et la société toute entière en profitent ».
Selon M. Ndayizeye, il a déjà embauché 20 employés permanents qui travaillent dans la production des jus et des savons, ainsi que 30 autres journaliers qui bénéficient des bonus sur la quantité des produits vendus. « Beaucoup de ces employés sont des jeunes. Nous mettons en avant les jeunes, parce que ce sont eux qui sont dynamiques pour travailler, car nos activités commerciales demandent beaucoup d’énergie. Nous les embauchons aussi dans le cadre d’appuyer le gouvernement dans son programme d’inviter les jeunes à lutter contre le chômage ».
Les clients augmentent au fur et à mesure
Concernant les activités de cette entreprise, le représentant légal souligne qu’elles sont en rapport avec la production de différentes sortes des jus et des savons liquides pour la propreté des maisons et des véhicules. « Tous nos produits sont issus des plantes naturelles et celles cultivées localement. On produit trois sortes de jus et cinq sortes de savons pour la propreté de la douche, des carreaux, pour le lavage des véhicules et des vitres, pour la lessive des habits et le champoon pour laver les cheveux».
M. Ndayizeye se réjouit du pas déjà franchi. Il déplore néanmoins le fait que les gens ne se sont pas encore appropriés l’utilisation des savons liquides pour la vaisselle, la propreté de leurs maisons ou de leurs véhicules. « Mais, grâce à la participation de notre entreprise dans les expositions-ventes qui sont souvent organisées dans notre pays, nous constatons que les clients augmentent progressivement ».
Le piratage, un des grands défis
Parlant des défis, le représentant de l’entreprise Kirumara costos company indique que les principaux défis sont liés au fait que la plupart de gens n’ont pas encore compris qu’au Burundi il y a des jeunes qui ont des talents et des dons pouvant alimenter les marchés burundais en produits locaux de bonne qualité. « Ils méprisent les produits locaux et continuent à consommer les produits importés. C’est un grand défi car au marché local, les produits locaux ne sont pas consommés comme il faut car les gens croient que les produits importés sont plus efficaces que ceux produits localement ». Selon lui, un autre défi est lié au manque de capital suffisant pour bien démarrer les activités. « On manque de gens qui nous soutiennent pour exécuter tous nos projets comme nous le souhaitons. Nous faisons aussi face au piratage de nos produits».
M. Ndayizeye demande au gouvernement de soutenir les jeunes qui ont déjà répondu à son appel en créant leur propre emploi. « Ils appuient eux-aussi la politique de l’Etat en offrant de l’emploi aux autres jeunes. Comme le gouvernement est notre parent, il faut qu’il nous soutienne afin que nous puissions consolider nos projets et donner de l’emploi aux jeunes. Il serait mieux d’ouvrir les portes pour que nous puissions participer aux foires internationales, afin de nous mesurer aux autres entrepreneurs étrangers mais aussi acquérir d’autres expériences et améliorer notre façon de travailler ».
S’organiser en association, mieux travailler
De son côté, Nestor Niyongabo, président de la coopérative Dutezimbere igiterwa c’Inanasi (COOP-DI Musongati) de la colline Nyabigozi de la commune et zone Musongati en province de Rutana, indique que les séances de sensibilisation organisées par les autorités administratives ont été bénéfiques pour les membres de cette coopérative et pour la population toute entière de cette localité. Selon lui, c’est grâce à ces séances de sensibilisation qu’ils se sont mis ensemble pour cultiver les ananas et créer une petite entreprise de transformation de jus d’ananas. «Nous nous sommes ainsi réunis et nous avons été unanimes pour cultiver l’ananas, car c’est une plante qui est bien adaptée à notre région ». Selon lui, au début, il s’agissait d’une simple association, mais au fur et à mesure, elle est devenue une coopérative.
Ils sont au nombre de cent trente six membres et produisent du jus d’ananas qu’ils cultivent eux-mêmes. « Après avoir vendu les premières récoltes, nous avons jugé bon de ne pas continuer à vendre les ananas, mais plutôt de les transformer en jus pour, non seulement donner de la valeur à notre projet, mais aussi pour la bonne conservation de nos ananas ». Et d’ajouter qu en 2010, ils ne parvenaient pas à produire 6 tonnes (t) d’ananas par an. Mais, quelques années plus tard, ils ont commencé à produire 21 t et 853 kg d’ananas par an. Aujourd’hui, ils sont capables de produire 50 casiers de jus par semaine et leurs champs d’ananas s’étendent sur une superficie de trois hectares.
La force, un grand capital pour démarrer les activités
A la question de savoir où ils ont tiré le capital pour démarrer leurs activités, M. Niyo-ngabo a indiqué que leur énergie physique a été leur premier investissement. « Chacun a amené la houe et nous avons défriché le terrain qui nous a été prêté par la commune. Nous y avons planté des ananas et c’est avec la première récolte que nous avons eu de l’argent. Sinon, au début, on n’avait pas de moyens financiers ».
Perspectives d’avenir
Tout en déplorant le fait qu’ils n’ont pas de point de vente pour écouler leurs produits, M. Niyongabo indique qu’ils comptent réaliser beaucoup de projets. « Avec la disponibilité des moyens financiers et de l’électricité, nous comptons agrandir notre entreprise et avoir du matériel moderne. Nous comptons également pratiquer l’élevage de grand et petit bétail. Nous envisageons aussi d’implanter une autre petite usine de fabrication de savons ».
M. Niyongabo ainsi que les membres de cette coopérative apprécient les efforts du gouvernement dans la sensibilisation des gens afin qu’ils puissent se regrouper en associations. « Ce projet est venu au moment opportun car, aujourd’hui, ils réfléchissent ensemble sur comment rentabiliser et valoriser leurs forces et leurs connaissances ».
Quant aux bénéfices tirés des activités de la coopérative, ils indiquent que la coopérative prend en charge à 50%, les soins médicaux des membres, de leurs conjoints et de leurs enfants. En cas de besoin ou en cas d’urgence, les membres reçoivent des prêts d’argent remboursables sans intérêt, etc.
Tous nos interlocuteurs trouvent que l’entrepreneuriat des jeunes est une garantie pour le développement du Burundi. Ils invitent les jeunes à prendre soin et à suivre les conseils prodigués par les administratifs, mais aussi et surtout à changer leur mentalité. Ils leur rappellent que le gouvernement n’est plus en mesure d’embaucher tous les jeunes qui terminent leurs études.
Astère Nduwamungu
Département de la documentation
Service de rédaction