La lutte contre la corruption, la fraude, les malversations économiques, l’éradication des conflits fonciers et la modernisation des titres fonciers, le changement des mentalités et de comportement de la population à la corruption. Sur toutes ces questions, la ministre Domine Banyankimbona, dans une interview avec le Renouveau du Burundi fait le point.
Le Renouveau : Comment comptez-vous éradiquer les conflits fonciers dans le cadre du PND ?
Ministre Domine Banyankimbona (D.B) : Au niveau des communautés, le Ministère de la justice, en collaboration avec le Ministère de l’Intérieur, de la Sécurité Publique et du Développement Communautaire ont déjà enclenché la promotion d’une justice de proximité à travers la mise en place des Conseils des notables des collines et des quartiers.
Ceci permettra le règlement des conflits, spécialement ceux relatifs aux propriétés foncières, par des arbitres qui maîtrisent les situations de leur entourage.
Au niveau des juridictions, des campagnes d’exécution des jugements et des descentes pour constats des lieux ont été organisés depuis que le PND est devenu un outil de référence.
Ainsi, pendant les quatre années de vie du PND, plus de 50 000 Jugements ont été exécutés mais d’autres pas restent à franchir.
Le Ministère de la Justice compte pérenniser les acquits par l’organisation régulière de telles campagnes et cela, au moins une fois l’année. Toutefois, il serait nécessaire que les juridictions soient équipés de moyens de déplacement pour que cette activité soit régulière sans plus attendre l’organisation des campagnes.
Le Ministère de la Justice compte également revoir la réglementation sur les voies de recours extra judiciaire qui sont souvent exploités par des procéduriers de mauvaise foi pour rendre interminables les procès en matière foncière.
Ceci ferra même objet de débats à travers les séances de moralisation de la population. Une nouvelle réglementation en matière d’exécution des jugements sera instauré particulièrement en matière de prescription.
L.R. : Toujours dans le cadre du PND, comment comptez-vous moderniser les titres fonciers ?
D.M. : La modernisation des titres fonciers fait objet d’une préoccupation du Ministère de la Justice.
Dans un premier temps, la Direction des titres fonciers et du Cadastre National a entrepris une campagne de sensibilisation à l’enregistrement des terres et la population répond favorablement.
Sachant que le manque d’enregistrement des terres est un frein au développement, un facteur de multiplication des conflits et de précarité du cadre de vie, l’enregistrement systématique des terres devient une solution à ces problèmes.
Le ministère de la Justice est donc entrain de mettre en place un programme national d’enregistrement des terres, tout en simplifiant les procédures et en mettant en place des équipes mobiles d’enquête foncière, de mesurage, bornage, d’enregistrement et délivrance systématique des titres fonciers.
Dans un second temps, Le Ministère de la Justice a songé à la digitalisation de tout le système et l’activité est en cours.
Eu égard au rôle tant économique que social des documents délivrés par les services de la Direction des titres fonciers et du cadastre national, les équipements informatiques performants assurant la sécurisation des ces derniers s’avèrent nécessaires.
C’est ainsi que la migration de la production des titres fonciers sur les papiers facilement périssables et falsifiables vers les titres fonciers biométriques est en cours.
Au vu des distances que la population en quête des services des titres fonciers et du cadastre national est amenée à parcourir, il est prévu une décentralisation des services pour un traitement rapide et peu coûteux des prestations.
L.R. : Comment comptez-vous contribuer au changement de mentalité et de comportement de la population face à la corruption tel que souhaité par le PND ?
D.B. : La lutte contre la corruption est une affaire de tous les citoyens. Au niveau du Ministère de la Justice, la sensibilisation et l’éducation patriotique sont des aspects du changement de mentalité et de changement de comportement.
Outre les aspects de sensibilisation et de formation patriotique, l’accès effectif à la justice suppose que tout citoyen ait la possibilité de dénoncer, dans la confidentialité, à l’autorité judiciaire ou administrative, les dysfonctionnements auxquels il est confronté et une suite appropriée doit être réservée à la dénonciation.
C’est dans ce contexte que le Ministère de la Justice a mis en place un système d’alerte et de dénonciation des dysfonctionnements permettant aux usagers des services publics de la justice d’être entendus et de donner des avis sur les services qui leur sont offerts.
Outre les boîtes à suggestion installées au niveau des juridictions et de l’administration centrale, des numéros verts ont été mis à la disposition du public pour en faire usage.
L.R. : Comment comptez-vous rendre efficace les comités locaux de lutte contre la corruption et les malversations économiques ?
D.B. : Dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, le Ministère de la Justice avait élaboré un plan stratégique sectoriel de prévention et de lutte contre la corruption 2015-2019 et des cellules y relatifs avaient été mises en place tant au niveau central que dans les services judiciaires. Des mesures d’accompagnement avaient été prises sans pour autant juguler complètement la corruption.
Le Ministère vient de mettre en place une cellule chargée de la bonne gouvernance, de l’éthique et de la lutte contre la corruption qui va proposer une nouvelle stratégie et des méthodes plus adaptées pour prévenir et lutter efficacement contre la corruption.
L.R. : Comment comptez- vous concrètement éradiquer la corruption et la fraude dans les services tant publics que privés ?
D.B. : L’éradication de la corruption et de la fraude dans les services tant publics que privés se conçoit au niveau judiciaire à travers la répression. De 2018 à 2021, les cas de corruption et de malversations économiques jugés par la Cour anti-corruption sont au nombre de 980, mais le phénomène perdure.
Dans le souci de rendre efficace les structures existantes et dans un souci de proximité de la justice anti-corruption, le Ministère compte mettre en place des chambres et sections spécialisées dans les tribunaux de grande instance et au niveau de tous les parquets.
Un suivi et un contrôle rigoureux des institutions en charge de la lutte contre la corruption et la fraude sera assurée avec de plus en plus des séances de moralisation de tous les acteurs.
En ce qui concerne la fraude, l’application de la réglementation en vigueur en ce qui concerne la répression et la saisie des biens ayant servi à commettre l’infraction doit être de mise. A ce titre, la Ministère de la Justice a mis en place une commission en charge de la gestion des biens saisis.
L.R. : Quelle évaluation pouvez-vous donner quant à l’exécution du PND sur la période déjà écoulée ?
L’exécution du PND 2028-2027 devait connaître une évaluation à mi parcours au cours de cet exercice 2022-2023.
Les données du Ministère de la Justice sur tous les indicateurs ont été renseignées à la Direction en charge de la Planification et du suivi-évaluation et font état d’une exécution évaluable à 60,1%.
L.R. : Je vous remercie
D.B. : C’est moi qui vous remercie plutôt
La Rédaction