Les grossesses en milieu scolaire constituent un obstacle majeur à la poursuite des études pour de nombreuses jeunes filles. Gérard Irambona, directeur de l’école fondamentale de Rutana l’a fait savoir le jeudi 12 juin 2025 lors d’un entretien accordé au Journal « Le Renouveau du Burundi ».
« Nous faisons tout ce que nous pouvons pour lutter contre les grossesses en milieu scolaire, mais sans l’étroite collaboration étroite des parents, notre action reste limitée », déplore M. Irambona. Selon lui, la majorité des cas de grossesse observés ces dernières années dans son établissement concernent des élèves manquant de repères ou dialogue familial. « Quand les enfants ne peuvent pas parler de sexualité à la maison, ils vont chercher des réponses ailleurs, souvent dans de mauvaises directions», signale-t-il. Cette analyse est partagée par de nombreux parents conscients des risques que courent leurs filles.
Francine Irakoze, mère de trois adolescentes à Rutana, admet qu’elle a longtemps évité les sujets liés à la sexualité. « Chez nous, c’est tabou. Mais j’ai compris que rester silencieuse met mes filles en danger. Maintenant, je leur parle ouvertement des règles, rapports sexuels, conséquences d’une grossesse précoce. Elles savent qu’elles peuvent me poser toutes les questions», souligne-t-elle.

Pour beaucoup des gens, cette évolution du dialogue familial représente une révolution culturelle. « C’est difficile, surtout pour nous les hommes, mais c’est nécessaire d’aborder ouvertement les questions de sexualité et reproduction avec les enfants en leur fournissant des informations précises et adaptées à leur âge. Quand j’ai vu une fille du quartier qui avait dû abandonner l’école à cause d’une grossesse, cela m’a réveillé. J’ai commencé à parler avec mes enfants, garçons comme filles. On discute sur l’importance du respect, des relations responsables. Ce n’est plus un sujet honteux, c’est une question d’avenir, » confie Jean Marie, père de six enfants à Rutana.
Une arme de premier plan
Face à cette situation, certaines écoles n’hésitent plus à impliquer directement les parents dans la sensibilisation. « Quand parents et enseignants tirent dans le même sens, les résultats sont visibles », confirmé M. Irambona.
Au-delà de la parole, les gestes comptent. L’attention portée aux fréquentations, comportements inhabituels, ou même au temps passé sur les téléphones, sont autant d’indices que les parents peuvent surveiller. Car, comme le résume Mme Irakoze : « prévenir une grossesse, ce n’est pas interdire de vivre, c’est accompagner et protéger. »
Dans un pays où l’avenir d’une fille dépend encore trop souvent de sa capacité à poursuivre sa scolarité, l’éducation parentale apparaît comme une arme de premier plan. Pas seulement pour éviter le pire, mais aussi pour construire un climat de confiance et d’échange dans lequel les jeunes peuvent grandir en sécurité et responsabilité.
Mynka Careille Iriho(Stagiaire)