Dans les provinces de Muyinga et Kirundo, la commission vérité et réconciliation (CVR) a organisé le samedi 26 juin 2021, les cérémonies de clôture provisoire de l’exhumation des restes humains des victimes des événements de 1972-1973. Le vice-président de la République qui a rehaussé de sa présence les cérémonies a demandé que les noms des Hutus et Tutsi qui ont sauvé ceux d’ethnie différent à la leur soient affichés dans les communes et les zones.
« La CVR vient de terminer une période de cinq semaines d’enquête sur la vérité des affreuses tueries massives menées auprès de la population burundaise pendant la guerre de 1972-1973. Comme résultat, plus de 631 restes humains ont été exhumés dont 474 en province de Muyinga et 157 en province de Kirundo », dit Pierre Claver Ndayicariye.
Selon lui, la vérité cherchée par la CVR est celle révélée par les veuves, les orphelins, les rescapés, les militaires et les fonctionnaires de l’Etat dans le temps et qui sont actuellement en retraite. Ces derniers témoignent qu’ils avaient vu comment leurs frères et sœurs Hutu étaient arrêtés et escortés dans des camions militaires ou privés et dès lors n’étaient plus apparus. « Nous avons effectué une enquête dans toutes les communes de la province de Kirundo. Nous avons écouté les orphelins, les veuves et d’autres différents témoins oculaires qui ont pu accepter de livrer à la CVR le secret de ce qu’ils ont vu et vécu. La CVR a en effet exhumé les restes humains dans des fosses communes renseignées par la population », a souligné M. Ndayicariye.
Les administratifs à tous les niveaux ont planifié les tueries
Le président de la CVR a précisé également que ladite commission, jusqu’à nos jours, peut dévoiler que la province de Kirundo qui, dans le temps faisait partie intégrante de celle de Muyinga, avait été la plus touchée. Toutefois, les auteurs de ces tueries ont été cités par des témoins encore vivants (veuves, orphelins et les rescapés). Il signale que la CVR a mené une enquête sur les fosses communes dans la commune Busoni. M. Ndayicariye a fait savoir que toutes les victimes de la crise de 1972-1973 avaient été tuées par les leaders suite à la mauvaise gouvernance du pays à l’époque avec le colonel Michel Micombero comme président de la République. Il s’agissait de gouverneurs, de commissaires d’arrondissement de Muyinga, d’administrateurs communaux, de chefs de l’armée et de la gendarmerie sans oublier les représentants du parti au pouvoir Uprona et de son mouvement affilié JRR.
Lesdites victimes avaient été accusées d’être des traitres, d’avoir des dettes envers les blancs et de tentative de coup d’Etat du gouvernement de Michel Micombero. Dans la province de Muyinga, d’autres avaient été tués par accusation de sorcellerie ou fuite aux taxes alors qu’en province de Kirundo, ils étaient accusés d’être des animaux appelés « mulele ». La CVR trouve la vérité auprès des sources humaines, dans les archives signées et scellées par les représentants des parquets d’alors. On y remarque des listes et la présentation des intellectuels à tuer.
Selon toujours M. Ndayicariye, la CVR est une commission instaurée par le gouvernement pour rechercher la vérité afin que le pays soit libéré à jamais des crimes. « Ce n’est pas l’ethnie qui tue, mais plutôt une mauvaise gouvernance », a déclaré M. Ndayicariye.
Afficher les noms de ceux qui ont protégé les autres
Le vice-président de la république du Burundi Prosper Bazombanza, dans son allocation, invite la CVR à afficher dans toutes les provinces, les communes et les collines, les noms des Tutsi et Hutu qui ont pris l’initiative de protéger les autres Burundais d’ethnie différente lors de ces tueries de 1972-1973 afin de servir d’exemple aux autres. Il n’y a pas d’ethnie tutsi ou hutu qui a tué d’autres car il n’y a pas eu d’assemblée générale ni de Hutu ni de Tutsi qui s’est tenue pour préparer la tuerie de telle ou telle ethnie. C’est une mauvaise gouvernance qui tue mais pas l’ethnie. Durant la crise de 1972-1973, les leaders profitaient du pouvoir qu’ils détenaient dans le gouvernement pour tuer leurs frères sans aucune autorisation ethnique. M. Bazombanza a demandé aux acteurs de la tuerie de 1972-1973 qui sont encore vivants de vouloir se repentir. Il a remercié les citoyens qui ont pu faciliter le travail d’enquête de la CVR afin de localiser les fosses communes.
Lors du voyage de presse, les médias ont remarqué que la CVR a trouvé des fosses communes renseignées, vérifiées et confirmées, non confirmées et vides. Ces derniers étaient en attente d’accueillir des corps sans vie. Lesdites fosses se trouvent tout près des anciennes prisons de la commune Vumbi en province de Kirundo, dans la réserve naturelle de Ruvubu, etc.
APPOLINAIRE NDIKURIYO