Après les élections au sein de l’ordre du barreau de Bujumbura, la rédaction du quotidien burundais d’informations « Le Renouveau », s’est entretenue avec certains de ses membres nouvellement élus. Il s’agissait de recueillir leurs impressions ainsi que leurs perspectives d’avenir dans le but de promouvoir la justice burundaise et la profession d’avocat au Burundi. Jean de Dieu Muhuzenge a indiqué que, parmi ses grandes priorités, figure le travail en synergie pour résoudre toutes les questions qui gangrènent la justice burundaise. Signalons que les femmes issues du barreau sont satisfaites du taux de leur représentation.
« D’une manière générale, je suis ravi d’avoir été réélu pour un autre mandat de deux ans à la tête de l’ordre du barreau de Bujumbura. Cela témoigne que les avocats issus de l’ordre ont toujours confiance en moi, et apprécient les réalisations sous mon mandat», a fait savoir M. Muhuzenge, bâtonnier de l’ordre du barreau des avocats de Bujumbura. A mon tour, j’ai pris l’engagement de servir mon ordre, la justice, les avocats ainsi que mon pays en âme et conscience en utilisant mes efforts et mes compétences. S’agissant de nouvelles perspectives envisagées pour promouvoir le barreau et les avocats, il a souligné qu’il va continuer à garder une forte cohésion entre les avocats de l’ordre du barreau de Bujumbura, qui est la base de tout. Il a précisé qu’au cours de son nouveau mandat, il a une ambition de renforcer les relations qui unissent le barreau de Bujumbura et le barreau frère de Gitega.
Le dialogue est déjà amorcé
Pour ce qui est de la mise en place d’une nouvelle loi régissant la profession d’avocat, une commission est déjà mise en place au sein du ministère de tutelle. Et des propositions seront émises par notre ordre afin d’échanger sur toutes les questions qui hantent la justice. Il a signalé que tous les nouveaux entrant au barreau seront formés pour les imprégner des principes fondamentaux de la profession. S’agissant de la réponse à l’appel du chef de l’Etat burundais, interpellant tout un chacun, dans son domaine à asseoir une justice de qualité pour tous, il a promis qu’en collaboration avec le barreau frère de Gitega, ils vont trouver la solution aux questions concernant l’indépendance de la magistrature ainsi que la corruption qui gangrène les magistrats et qui n’épargne pas non plus le monde des avocats.
M. Muhuzenge a dit que le chef de l’Etat s’est adressé aux juges, et avocats car, ce sont des auxiliaires de la justice. Pour corrompre un juge, il doit y avoir nécessairement l’implication d’un avocat, directement ou indirectement. « Je profite de cette occasion pour appeler les avocats de ne plus tremper dans la corruption qui gangrène la justice et qui cause du tort au pays. Comme solution, en tant que bâtonnier, des causeries judiciaires seront organisées à l’intention de tous les avocats. Nous allons également mettre en place des boîtes à suggestion pour favoriser la dénonciation des cas de corruption », a-t-il informé.
Jouir de la qualité d’avocat
Aux autorités ayant le pouvoir de faire des nominations de magistrats dans les hautes fonctions judiciaires, il a demandé qu’elles soient fondées plus sur les compétences que sur d’autres considérations, parce qu’un avocat professionnellement incompétent ne peut pas produire des conclusions bien faites, de même qu’un juge incompétent ne peut pas rendre une décision juridiquement motivée. Il faut privilégier toutes ces personnes qui ont une expérience professionnelle, en y ajoutant ceux qui ont une moralité irréprochable. Etant à la tête du barreau, je vais travailler d’arrache-pied pour avoir des avocats solidaires, unis et animés de bonne foi, et prêts à travailler pour l’intérêt de la justice tout en respectant les règles d’éthique et de déontologie et de la loi. Concernant le développement du barreau, M. Muhuzenge a promis que les activités de renforcement de capacités des avocats en interne et externe vont continuer pour améliorer leur métier, et les mettre à jour sur les textes et lois actualisés.
« Sur le plan déontologique et disciplinaire, nous allons organiser des formations pour ceux qui embrassent la carrière d’avocats, afin qu’ils sachent ce qui est permis ou ce qui est interdit. Pour jouir de la qualité d’avocat, il faut être successivement outillé et discipliné, apte à répondre aux règles régissant la profession d’avocats». Sur le plan matériel, il a signalé que son grand souci est de doter au barreau de Bujumbura son propre immeuble.
« Nous sommes satisfaites de la représentativité des femmes »
Quant à Ida Djuma, élue deuxième au sein du barreau, elle est satisfaite de la représentativité des femmes pour l’actuel mandat. « Actuellement, nous sommes quatre femmes, alors qu’au précédent mandat on était trois. C’est un autre pas franchi et nous espérons que dans le prochain mandat, les femmes pourront atteindre un taux de 50%, parce qu’actuellement, nous avons dépassé les 30% qui sont prévus par la Constitution burundaise », a apprécié Mme Djuma. Cette dernière a affirmé qu’après ces élections, tout le monde commence à comprendre que la femme a aussi un grand rôle à jouer au sein du barreau et ailleurs. C’est un sentiment de satisfaction pour nous les femmes issues du barreau de Bujumbura, mais aussi celles du domaine juridique en particulier.
Une autre chance que nous avons, c’est que dans le programme du bâtonnier, il encourage toujours les femmes juristes à pouvoir se faire élire jusqu’au poste du bâtonnat. Tenant compte des grandes préparations des femmes, Mme Djuma a affirmé qu’il y a espoir que le prochain mandat sera dirigé par une femme. Elle a informé que les femmes doivent se mettre en tête qu’elles sont capables de réaliser beaucoup de choses. Donc, il faut savoir que quand une femme se décide, elle peut faire tant de choses autant que les hommes, voire plus que ces derniers. « Au sein du barreau, il existe une commission des femmes avocates. Et parmi ces dernières, nous allons choisir une et la préparer sur tous les niveaux afin qu’elle soit candidate au poste du bâtonnier pour le prochain mandat », a informé Mme Djuma, tout en précisant qu’il suffira qu’elle soit une femme qui est capable de mettre en place un programme qui pourra être source du développement de tous les avocats en général et les femmes avocates en particulier.
Les femmes ont peur de s’engager
Parlant des défis que les femmes devront relever pour pouvoir occuper une place de choix, Mme Djuma a mentionné qu’elles ont peur de s’engager ou de prendre de grandes responsabilités. « Nous avons constaté que beaucoup de femmes n’ont pas accepté d’être des avocates de grandes entreprises. Elles n’ont pas confiance en elles mêmes, et la majorité des clients n’ont pas confiance aux femmes », a-t-elle souligné.
Il est temps que les femmes montrent qu’elles sont capables de servir comme les autres avocats. « Bien sûr que ce n’est pas facile d’exercer le métier et en même temps être épouse et mère de famille. Mais, une fois qu’une femme s’organise, rien ne peut l’empêcher de cumuler plusieurs fonctions. Seulement, il faut que nous ayons un grand courage, parce qu’il y a aujourd’hui des femmes qui sont les managers de leurs propres cabinets », a enfin interpellé Mme Djuma.
Avit Ndayiragije