Après presque quatre ans qu’il y a eu promulgation de la loi no1/19 du 11 septembre 2018 régissant la presse au Burundi, les élus du peuple se sont réunis en séance plénière, le mardi 7 mai 2024 pour revoir la loi en vigueur en vue d’en adopter une autre. Cela intervient dans un contexte où les acteurs et partenaires du secteur médiatique sont unanimement d’accord de revoir la loi régissant la presse actuellement dans certaines dispositions pour l’adapter à la réalité du moment.
Selon le ministre en charge de la communication, Léocadie Ndacayisaba, contribuer à l’élargissement de l’espace démocratique et des libertés publiques d’une part et s’adapter à l’évolution des Technologies de l’information et de la communication d’autre part, sont les objectifs que vise la révision de la loi régissant la presse actuellement. La visée? selon toujours cette dernière, c’est de favoriser le dialogue et la diversité des courants de pensées fondés sur la responsabilité juridiques des professionnels des médias. Il s’agit également de garantir aux citoyens, la protection des droits à l’image, à la vie privée, à l’honneur et à la dignité ainsi qu’à la protection des bonnes mœurs.
Cependant, la nouvelle loi régissant la presse en attente de promulgation se veut d’apporter des innovations notamment sur, la prise en compte de l’évolution des médias; l’élargissement des droits et devoirs des journalistes et des organes de presse; la clarification sur la place du cinéma et de la publicité par rapport aux médias; la dépénalisation partielle des délits de presse ainsi que la consécration de certains droits reconnus aux citoyens.
Pour ce qui est de la prise en compte de l’évolution des médias, la pensée va à accorder de plus en plus une place importante aux radios communautaires et leur spécificité concernant notamment le statut particulier de leurs journalistes dont la totalité d’entre eux sont bénévoles. Le nouveau projet de loi accorde également de l’importance à la presse en ligne alors que la loi en vigueur ne lui réserve aucune place. Pour l’élargissement des droits et devoirs des journalistes et des organes de presse, la loi veut l’épanouissement des journalistes notamment en signant des contrats de travail avec leurs médias mais aussi en ayant une rémunération conséquente. En outre, les responsables des organes de presse agréés doivent s’assurer que tous les membres de leur personnel, liés par un contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée, le sont conformément à la législation du travail et à la législation sociale au Burundi.
Dépénalisation de certains délits de presse
Le nouveau projet de loi clarifie la place du cinéma et de la publicité dans l’espace médiatique. Etant donné que la loi en vigueur prend le cinéma et la publicité comme des médias à part entière, le nouveau projet de loi propose le cinéma comme un produit culturel et non un média. La publicité est aussi considérée comme telle par le fait qu’elle poursuit d’autres objectifs que ceux d’informer et de former. Toutefois, le cinéma et la publicité ne seront reconnus comme des médias que lorsqu’ils seront diffusés par voie médiatique.
Quant à la dépénalisation, il s’agit de la substitution des peines d’amendes à des peines de servitudes pénales et non la suppression pure et simple des sanctions pénales. Contrairement à la loi régissant la presse de 2015, le nouveau projet de loi prévoit une dépénalisation partielle des délits de presse comme l’injure ou l’imputation dommageable commis de bonne foi par le journaliste. Pour ce qui est de l’imputation dommageable, il est proposé que le journaliste soit exonéré de condamnation s’il apporte la preuve de l’exactitude des allégations quand celles-ci sont en rapport avec des affaires où l’intérêt général de l’Etat est en jeu. Pour ces délits, l’amende proposée est d’un montant allant de cent mille à cinq cent mille francs burundais. Les infractions telles que l’incitation à la haine raciale et ethnique ou l’atteinte à la sureté de l’Etat sont sanctionnées conformément au code pénal. Quant à ce qui est de la consécration de certains droits reconnus aux citoyens, le projet de loi propose une amende allant de cinq cent mille à un million cinq cent de francs burundais pour les fait d’atteinte à la vie privée, atteinte à la présomption d’innocence et la divulgation de l’identité des victimes des violences sexuelles sans leur accord. Cela est due au fait que le code de déontologie de la presse ne prévoit pas de sanction pénale, mais invite le journaliste à s’abstenir de diffuser ou publier de tels faits. Pour les délits commis sans rapport avec le métier de recherche, de traitement et diffusion de l’information, ils restent soumis aux dispositions du code pénal. Signalons que le projet de loi a été adopté à l’unanimité.
Laurent Mpundunziza