Dirigée par le président du Sénat, Emmanuel Sinzohagera, le Sénat du Burundi a tenu le vendredi 21 février 2025, une séance plénière consacrée à l’examen et l’adoption d’un projet de loi sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Cette initiative vient répondre aux insuffisances constatées dans la loi no 1/02 du 4 février 2008, jugée dépassée face aux défis contemporains.
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Dans son exposé des motifs, le ministre des Finances, du budget et de la planification économique du Burundi, Nestor Ntahontuye, a mis en lumière plusieurs faiblesses de l’actuelle législation. Tout d’abord, l’absence de pouvoirs dévolus aux autorités pour geler, saisir et confisquer les avoirs d’individus ou d’entités suspectés de financement du terrorisme a été pointée du doigt. En outre, les nouvelles technologies financières, notamment les crypto-monnaies, ont créé de nouvelles failles dans la régulation, facilitant le blanchiment de capitaux en dehors des circuits de surveillance traditionnelle.
Pour le ministre Ntahontuye, l’inefficacité des sanctions prévues par la loi de 2008 en est l’une des raisons ayant milités pour la révision de cette loi. Les peines actuelles ne sont ni assez dissuasives sur le plan pénal, ni suffisantes pour impacter financièrement les criminels. Par ailleurs, les délais trop longs pour appliquer ces sanctions réduisent leur efficacité. Enfin, l’insuffisance des mécanismes de coopération internationale freine les échanges d’informations entre juridictions, laissant des brèches exploitées par les réseaux criminels.
Face à ces insuffisances, le projet de loi présenté propose plusieurs amendements. Il définit précisément le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, en s’alignant sur les standards internationaux. De plus, il impose aux plateformes d’échange de cryptomonnaies les mêmes obligations que les institutions financières traditionnelles, en instaurant un suivi rigoureux de leurs transactions.
Le texte de loi prévoit également un renforcement de la coopération internationale pour une lutte plus efficace contre ces crimes financiers transnationaux. L’une des innovations majeures est la création d’une Cellule nationale de renseignements financiers, dotée d’une protection fonctionnelle et d’une immunité pénale.
Au cours des débats, plusieurs sénateurs ont manifesté leurs inquiétudes quant au risque d’abus que pourrait engendrer ce statut d’immunité. En réponse, le ministre en charge des finances, M. Ntahontuye, a justifié cette disposition en rappelant qu’elle est conforme aux pratiques internationales. Il a expliqué que la cellule devait bénéficier d’une protection fonctionnelle pour mener à bien ses missions sans ingérence, tout en précisant que des mécanismes de contrôle seront mis en place pour prévenir tout abus.
Après des débats nourris, le projet de loi a été adopté à l’unanimité. Son entrée en vigueur marquera une étape décisive dans la modernisation du cadre juridique burundais en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Amédée Habimana