Impliquer les communautés riveraines pour une gestion facile
Dans le souci de préserver et protéger les parcs de Kibira et Rusizi, l’organisation Conservation, communauté de changement (3C en sigle) a adopté une approche qui consiste à impliquer les communautés riveraines dans la gestion des écosystèmes s’y trouvant. Le président de la 3C, Léonidas Nzigiyimpa s’exprime sur les activités en cours et sur la plus-value dans l’implication des communautés dans la gestion des ressources naturelles. C’est une interview nous accordée, le mardi 1er octobre 2025.

Léonidas Nzigiyimpa: « Mieux que ce soit un lieu à détruire, ça devient finalement un joyau à protéger parce que le parc est en train également de participer à l’amélioration des conditions de leur vie (Photo: Eliane Nduwimana)
Léonidas Nzigiyimpa: La 3C en appui avec le Pnud et en collaboration avec l’ l’Office burundais pour la protection de l’environnement (OBPE), est en train de réaliser notamment les activités d’ouverture des pare-feux autour des parcs de Kibira et Rusizi. Il y a également les activités de production des arbres forestiers et agro-forestiers. Il s’agit de 317 000 plants d’arbres qui sont en cours de production dans cette pépinière.
Une partie de ces arbres sera utilisée pour planter un double lit pour renforcer la démarcation physique des limites des parcs de Kibira et Rusizi. Une autre partie sera utilisée pour restaurer et stabiliser les berges des cours d’eau. Nous sommes en train de restaurer 20 cours d’eau prenant source dans le parc national de la Kibira et 2 cours d’eau qui traversent des parties du parc national de la Rusizi. Alors, il est question de restaurer ces cours d’eau parce qu’il ne s’agit pas des cours d’eau.
Une autre partie sera utilisée pour être plantée dans les zones tampons. Mais, il y aura également des bambous pour renforcer la stabilisation des berges de ces cours d’eau et également les communautés vont mettre en défunt ces zones tampons pour restaurer les galeries forestières.
L.R: Comment la 3C implique les communautés dans la gestion de ces parcs?
M. Nzigiyimpa: Dans toutes ces activités qui impliquent les communautés locales, la 3C a développé une approche d’accompagnement et de paiement des services environnementaux. Elle accompagne les communautés à s’organiser dans des groupements, elle les accompagne dans la structuration de ces groupements. Ces derniers doivent être reconnus localement par l’administration communale. Cette reconnaissance est sanctionnée par des attestations de reconnaissance.
Mais également, la 3C accompagne ces communautés à ouvrir des comptes dans les banques de la place ou dans les instictutions de microfinances. Le paiement des services environnementaux rendus par ces communautés doit transiter dans les comptes communs ouverts dans ces instictutions bancaires de la place.
Et dans cet accompagnement, la 3C a développé une approche qui consiste à accompagner les communautés à utiliser une partie des paiements des services environnementaux pour leurs besoins de première nécessité et à épargner sur le compte commun ouvert, une autre partie des paiements. Ces 40% permettent à ces communautés ou groupements de constituer un petit capital pour s’octroyer de petits crédits à l’interne. Et ces derniers pourront développer des activités génératrices de revenus à leur convenance. Par exemple, celui qui veut développer un petit commerce, il est libre de le faire à travers le petit crédit contracté et remboursable en 3 mois.
L’accompagnement des communautés renforce la cohésion dans les groupes. Les membres de ces groupements se retrouvent régulièrement pour parler de leur caisse, parler des arbres en cours de production, parler des arbres plantés ou pour veiller sur la limite pour qu’ils ne soient plus méconnaissables. Et quand il y a la brousse, la communauté y passe pour nettoyer, entretenir, et éclaircir. Ça maintien une certaine collaboration entre les services de conservation de l’Office burundais pour la protection de l’environnement et les communautés riveraines. Et à la place des conflits, il y a maintenant, la collaboration.

Les communautés riveraines du parc de Kibira en train de préparer la terre pour la production des pépinières d’arbres (Photo: Eliane Nduwimana)
L.R: Comment ces communautés accompagnées par la 3C perçoivent ces parcs?
M. Nzigiyimpa: Tous les paiements qui se font suite aux services environnementaux le sont grâce à la présence du parc, donc le parc devient un moteur de développement. Et la perception des communautés pour le parc change. Mieux que ce soit un lieu à détruire, ça devient finalement un joyau à protéger parce que le parc est en train également de participer à l’amélioration des conditions de leur vie.
L.R: Pourquoi ces groupements sont constitués par les communautés batwa et surtout les femmes?
M. Nzigiyimpa: Partout là où nous sommes en train de travailler, nous trouvons que les femmes sont majoritaires. On le sait très bien que les hommes s’aventurent à la recherche du travail. Et généralement dans les localités un peu éloignées des centres urbains, on trouve que les populations qui restent sont constituées par des femmes. Ce sont également les femmes qui sont très impliquées dans le ramassage du bois de chauffage pour la cuisson. Donc, les femmes ont un rôle dans la dégradation des ressources naturelles. Et elles ont également un grand rôle par rapport à la restauration de ces ressources.
C’est la même chose pour les membres de la communauté batwa. Vous le savez qu’autour de la Kibira, il y a des batwa qui ne vivent que, presque à 100%, des ressources naturelles prélevées dans le parc de la Kibira. C’est donc normal qu’on les trouve tout autour de ce parc. Le fait qu’ils sont engagés à ces activités, c’est un aspect positif qu’il faut saluer.
L.R: Est-ce qu’après ce projet, peut-on dire que ces écosystèmes seront développés?
M. Nzigiyimpa: L’implication des communautés vise la pérennité. Les projets naissent, grandissent et disparaissent. Mais, ces communautés vont rester. Quand il y a déjà un processus de cohabitation pacifique entre le parc et les communautés, cela va perdurer. C’est pour cette raison que nous sommes en train de développer cette approche et nous savons que même si le projet sera fini, les communautés resteront engagées à protéger ces ressources.
Eliane Nduwimana