La transition vers l’agro-écologie au Burundi est une nécessité pour le développement durable, même si elle se heurte à des obstacles majeurs. Un expert de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), met en lumière les défis à surmonter pour une adoption à grande échelle.
Au Burundi, la nécessité d’une agriculture plus durable et résiliente face aux aléas climatiques est de plus en plus évidente. C’est dans ce contexte que le ministère de l’Environnement, de l’agriculture et de l’élevage, en collaboration avec l’agence Enabel, a organisé un atelier d’échanges sur la transition agro écologique. L’objectif est de déterminer les priorités de formation pour les acteurs du secteur.

Epaphras Ndikumana, agronome et expert au sein du projet multinational de Renforcement de l’état de préparation et de la réponse d’urgence à la crise alimentaire au Burundi, aux Comores, en Somalie et au Soudan du Sud (Separef) de la FAO, a expliqué que si l’agro écologie est une approche holistique offrant de nombreux avantages (durabilité, respect de l’environnement, santé des sols), elle n’est pas sans défis. Selon lui, ces obstacles pourraient freiner son adoption à grande échelle si rien n’est fait.
« En phase de transition, les rendements peuvent chuter temporairement, surtout si les sols sont dégradés », a-t-il déclaré, soulignant que cette baisse initiale peut avoir un impact direct sur la sécurité alimentaire et les revenus des agriculteurs. Il a également noté que l’agro écologie, contrairement à l’agriculture conventionnelle, exige des connaissances techniques accrues. « Les agriculteurs ont besoin de formation et d’accompagnement technique pour bien comprendre les interactions complexes entre le sol, le climat, la biodiversité et les cultures », a-t-il précisé.
Une transition lente et un besoin de soutien
L’expert de la FAO a mis en évidence le caractère progressif de la transition. « La mise en place des pratiques agro écologiques demande du temps, parfois plusieurs années avant de voir des résultats significatifs », a-t-il rappelé. De plus, il a fait observer que l’agro écologie peut être plus exigeante en main-d’œuvre, notamment pour des tâches comme le désherbage manuel.
Epaphras Ndikumana a également évoqué les difficultés de commercialisation. « Les produits agro écologiques ne bénéficient pas toujours de circuits de commercialisation valorisants ou différenciés », a-t-il indiqué. Pour lui, il peut être difficile pour les agriculteurs de vendre leurs produits à un meilleur prix sans certification claire.
Manque de politiques publiques adaptées
Un autre frein majeur, a-t-il souligné, est le manque de soutien politique et institutionnel. « Les politiques agricoles favorisent souvent l’agriculture industrielle », a-t-il regretté. Les pratiques agro écologiques ne sont pas toujours intégrées dans les politiques publiques, rendant l’accès aux subventions ou aux crédits, plus difficile pour ceux qui souhaitent opter pour cette approche.
En l’absence de produits chimiques de synthèse, l’expert a mis en garde contre une plus grande vulnérabilité des cultures aux maladies et parasites, tant que la résilience de l’écosystème n’est pas pleinement établie. Enfin, il a évoqué le manque d’infrastructures adaptées pour le stockage, la transformation et la conservation des produits agro écologiques.
Malgré ces défis importants, la transition agro écologique est une « nécessité stratégique pour le Burundi », a-t-il conclu. C’est un levier pour un développement durable, résilient et équitable, essentiel pour répondre aux besoins des générations actuelles et futures.
Jean Marie Ndayisenga