Pour soulager les mémoires blessées à cause de différentes crises qui ont endeuillé le Burundi, un processus de justice transitionnelle a été initié pour la restauration du vouloir vivre ensemble. La Commission vérité et réconciliation (CVR) a été mise en place avec une mission ultime de découvrir la vérité afin d’amener les Burundais à cheminer ensemble vers la réconciliation effective.
Pierre Claver Ndayicariye, président de la CVR fait savoir que le chantier de la justice transitionnelle est très vaste. Le premier chemin à faire pour détraumatiser les familles qui ont perdu les leurs, consiste d’abord à connaître la vérité, exhumer la vérité, déterrer la vérité. Car, il y a des familles à qui on a dit que leurs papas, fils et filles sont partis au Malawi, en Zambie, etc, mais qu’après les exhumations, elles ont découvert la vérité que ces gens perdus ont été en fait, arrêtés, tués et enterrés.
Un impact positif ou négatif dans la communauté
Selon Aloys Batungwanayo, commissaire à la CVR, certains sites mémoriels, notamment les monuments, peuvent avoir un impact positif dans la communauté si et seulement si ces derniers servent à redorer l’humanité des victimes. Il a donné l’exemple du monument de Bururi au Séminaire de Buta. Pour M. Batungwanayo, ce monument est là pour rendre la dignité des victimes, parce qu’on y trouve des noms et des photos des victimes. Quand on est là, on voit qu’on rend la dignité à ces élèves. Ces monuments ont un impact négatif lorsqu’ils sont muets c’est-à-dire lorsqu’ils accusent dans la globalité. Ainsi, ils peuvent raviver les violences au lieu de redorer la dignité des victimes. M. Batungwanayo donne l’exemple du monument Kwibuka à Kibimba sur lequel on n’y trouve pas les noms ni les photos des victimes.
Alexis Nibigira, chargé des programmes psychosocial indique que les sites mémoriels sont un des piliers de la justice transitionnelle. Par rapport aux victimes ou aux survivants, c’est un signe qui montre le traitement digne de la reconnaissance officielle d’un état par rapport aux violations des droits humains qui ont endeuillé le pays. Et cela soulage les victimes, survivants par cette reconnaissance des faits historiques. Le processus d’exhumation est l’un des aspects très importants dans la recherche de la vérité à travers les faits ineffaçables de l’histoire horrible du passé. Les gens qui n’ont pas eu l’opportunité d’inhumer les leurs et de faire le deuil, elles s’y retrouvent à une situation de détresse psychologique suite à l’exposition des ossements ou autres effets des restes humains. A cet effet, la mémoire devient d’une manière ou d’une autre tangente face à cette situation.
L’accompagnement psychosocial doit être transversal
Après l’exhumation, on passe à une autre étape qui consiste à ériger les sites mémoriaux par rapport au passé. « Quand on parvient à ériger le site mémoriel des corps exhumés ce sont des rythmes officiels communautaires et personnels de la reconnaissance des faits du passé qui peuvent soulager les victimes car ils se rendront compte que les restes des leurs sont traités de façon humaine », a souligné M. Nibigira. Selon toujours Alexis Nibigira, au niveau de commémoration ou de l’exhumation, l’accompagnement psychosocial doit être transversal parce que l’assistance psychosociale est un processus visant à favoriser la résilience des individus, des familles, des communautés. Elle renforce les personnes à restaurer leur normalité par rapport à l’expérience négative. On empêche que la détresse et la souffrance ne deviennent plus graves et on aide à surmonter les moments difficiles. L’accompagnement du processus de découvrir la vérité d’exhumation, de commémoration permet la guérison, l’apaisement de la blessure, l’engloutissement psychique du passé. Et enfin les gens retrouvent la vie et deviennent capables d’interagir dans la société et de ce fait, favorable à la réconciliation, la sauvegarde de la paix pour le développement d’une mémoire positive et une lecture commune et critique des événements sur le passé commun.
Eliane Nduwimana