Dans un contexte de coopération croissante entre le Royaume du Maroc et la République du Burundi, notre rédaction a eu l’honneur de s’entretenir en exclusivité avec Dr. Abdelouahhab Makhtari, Chargé d’Affaires de l’Ambassade du Royaume du Maroc à Bujumbura. Cet échange privilégié a permis d’aborder plusieurs aspects des relations bilatérales entre les deux pays, notamment les domaines politiques, diplomatique, parlementaire, éducatif, de santé et des investissements économiques. Avec un ton à la fois franc et cordial, le Diplomate marocain revient sur les priorités de la mission diplomatique, les projets en cours, ainsi que la vision partagée d’un partenariat sud-sud solide, avantageux et mutuellement bénéfique. Une interview riche en perspectives et en éclairages sur une coopération bilatérale multiforme et multisectorielle avancée, agissante et renforcée. Le Maroc est prêt à accompagner le Burundi dans sa vision prospère ‘Burundi, Pays Emergent en 2040, et Développé en 2060.
Le Renouveau (L.R) : Quelle est actuellement la situation politico-économique du Maroc ?
Abdelouahhab Makhtari (A.M) : Au Royaume du Maroc, il y a une stabilité politique très remarquable, sous le leadership éclairé de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’Assiste. Les partis politiques travaillent dans une dynamique qui reflète une santé politique saine, avec une concurrence loyale entre les différents partis politiques, et en pleine synergie avec les orientations stratégiques du Royaume. Dans notre pays, le climat politique se remarque également par l’engagement de toutes les forces vives de la nation pour la défense de l’intégrité territoriale de notre payset la marocanité de notre Sahara. Un engagement ferme pour Sa Majesté le Roi, pour le Gouvernement, pour les partis politiques, pour les institutions nationales et pour tous les citoyens marocains. Une unanimité qui rend cette Cause Nationale prioritaire et centrale pour le Maroc.

A ce sujet, j’informe vos lecteurs qu’a peu près 118 Etats reconnaissant actuellement la Marocanité du Sahara, et récemment le Royaume-Uni, le Kenya ont reconnu la souveraineté du Maroc sur ses Provinces du Sud et ont soutenu le plan d’autonomie présenté par le Maroc en 2007, considéré par les Résolutions de l’ONU comme étant la solution durable, réaliste et pragmatique pour résoudre le différend autour le Sahara. Les reconnaissances susmentionnées succèdent celles des Etats-Unis, de la France, de l’Epargne et les dizaines de pays européens, africains et américains.
S’agissant de la situation économique, je peux vous dire que l’économie marocaine a fait preuve d’une forte résilience face à divers défis, notamment un ralentissement de l’économie mondiale, un choc inflationniste et le tremblement de terre de la province d’Al Haouz. Et Malgré ces obstacles, la croissance économique s’est accélérée, avec un une augmentation du PIB de 3,4 pour cent en 2023. Les principaux catalyseurs de cette accélération ont été le rebond du secteur touristique qui a enregistré l’entrée au Maroc de plus 17 millions touristes en 2024, et l’orientation des niches manufacturières vers l’exportation notamment le secteur automobile et aéronautique.
S’agissant des investissements directs étrangers IDE, Il n’y a pas moins de deux jours, le Royaume-Uni, après avoir reconnu la souveraineté du Maroc sur son Sahara, a annoncé que 6 milliards d’euro seront investi au Maroc, y compris dans les Provinces du Sud. La Chine a annoncé l’investissement de près de 10 milliards de dollars, les Émirats ont annoncé près de 14 milliards de dollars qui seront consacré à l’investissement dans le domaine des énergies. L’Union Européenne a, quant à elle, annoncé des investissements qui couvrent plusieurs secteurs. Ces annonces substantielles confirment l’amélioration croissante du climat des affaires au Maroc et l’intérêt croissant affiché par les opérateurs internationaux pour l’investissement dans notre pays, tous secteurs confondus.
J’ajoute également que le Maroc est le deuxième investisseur africain en Afrique avec près 1000 entreprises marocaines opérant dans les secteurs des télécommunications, des mines, des énergies renouvelables, des infrastructures, de l’immobilier, du tourisme, de la formation…etc. Des entreprises présentes partout en Afrique avec des investissements qui s’établissement à plus de 10 milliards de dollars. Ces entreprises dont certaines sont des multinationales, en l’occurrence l’OCP-Africa qui couvrent le continent africain afin de répondre aux besoins des pays africains dans le domaine des fertilisants.
[Office chérifien des phosphates, est un groupe marocain spécialisé dans l’extraction, la transformation et la commercialisation des phosphates. Il est le premier exportateur mondial de phosphate brut, d’acide phosphorique et d’engrais phosphatés, NDLR].
(L.R) : Comment est l’état de coopération entre le Maroc et le reste des pays africains ? Et comment le Maroc conçoit-t-il son rôle dans la promotion de la coopération sud-sud ?
(A.M) : Pour nous, la coopération sud-sud est une orientation stratégique. Sa majesté le Roi, Mohammed VI Que Dieu l’Assiste a mené depuis son intronisation une politique sud-sud agissante avec tous les pays africains, en misant sur des partenariats gagnant-gagnant. Les piliers majeurs qui encadrent cette coopération s’avèrent l’échange d’expertises et d’expériences avec les pays amis dans les secteurs prioritaires comme les infrastructures, les énergies, l’électricité, l’assainissement, la télécommunication, l’agriculture, l’immobilier, le tourisme etc. A cela s’ajoute l’octroi annuellement des quotas de bourses aux pays africains dans la perspective de former des élites africaines capables de répondre aux besoins du marché de l’emploi selon les standards internationaux demandés. L’approche sud-sud se focalise ainsi sur le renforcement des capacités via des coopérations tripartites en collaboration avec des agences internationales de la coopération au développement qui collaborent étroitement avec le Maroc, sous l’égide de l’Agence Marocaine de la Coopération Internationale (AMCI) afin de dispenser des formations et organiser des ateliers techniques en faveur des pays africains amis.
Pour la deuxième partie de votre question au sujet de ma mission au Burundi, je peux vous dire que comme pour tout diplomate marocain, la première mission est concentrée sur le renforcement des relations bilatérales, tous secteurs confondus avec le Burundi, en concertation bien évidemment avec les autorités burundaises compétentes. L’objectif ultime serait des créer des liaisons permanentes entre les institutions des deux pays respectifs pour tisser des relations politiques, diplomatique et économiques prometteuses et mutuellement bénéfiques pour les deux peuples frères.
L.R : Comment décrivez-vous l’état actuel des relations entre le Maroc et le Burundi ?
(A.M) : Les relations bilatérales sont très excellentes à tous les niveaux. Au niveau politique, le Royaume du Maroc et le Burundi entretiennent de très bonnes relations et entament des concertations permanentes pour en discuter les questions d’intérêt commun à l’échelle régionale, continentale et internationale. Le Burundi comme vous le savez, qu’est un allié stratégique pour notre pays, a reconnu la Marocanité du Sahara et avait ouvert un Consulat Général à la ville de Laâyoune dans nos Provinces du Sud.
Sur le plan de la coopération bilatérale, on vient juste d’organiser la première Session de la Coopération Mixte de Coopération(CMC) Maroc-Burundi, qui s’est tenue à Rabat le 12 mai dernier. C’était l’occasion idoine pour la signature de 13 instruments juridiques, dont une Feuille de Route de Coopération qui couvre plusieurs secteurs de coopération prioritaire pour le Burundi. Il y a eu également la signature de dix Accords et MoU couvrant plusieurs secteurs et domaines économiques stratégiques en l’occurrence le tourisme, l’agriculture, les mines, la gouvernance, la coopération décentralisée, la formation professionnelle et d’autres…et je vous annonce également que d’autres Accords sont encours de finalisation entre les deux pays et seront conclus dans d’autres échéances.
L.R : Y-a-t-il des initiatives prévues pour renforcer les échanges culturels entre les deux pays que vous qualifiez de frères et amis ?
(A.M) : Depuis mon arrivée au Burundi, j’ai essayé de renforcer la coopération culturelle entre les deux pays ou la culture représente un moteur pour la croissance et le développement économique. Il ya des tambourinaires burundais qui ont assistés à deux événements phares au Maroc, le premier à la ville d’Essaouira et le deuxième tenu récemment à Fès pour présenter le tambour burundais inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. C’était des moments conviviaux durant lesquels le public marocain a pu découvrir la musique et la danse traditionnelle burundaise. « La culture est une manifestation sociale de la mémoire humaine collective » ajoute-il .
Le Maroc a aussi ouvert une section de la Fondation Mohamed VI des Oulémas Africains ayant comme objectif la prolifération d’un discours religieux modéré et le renforcement de l’éducation, de l’enseignement de la langue Arabe, et d’autres sujets sociaux ayant trait à la santé.
L.R : Quels sont les principaux domaines de coopération entre nos deux pays. Y a-t-il des partenariats économiques en cours entre les entreprises marocaines et burundaises?
(A.M) : Les principaux domaines de coopérations prioritaires couvrent d’abord la formation professionnelle. Le Maroc a octroyé 130 bourses en 2024, et vient d’octroyer 130 autres en 2025 dans la perspective d’accorder 1500 bourses aux étudiants burundais. L’objectif ultime serait de renforcer les capacités qui pourraient servir davantage la vision du Burundi, Pays Emergent en 2040 et Développé en 2060. L’autre secteur comprend le renforcement des coopérations dans le domaine agricole étant donné que le Maroc est le premier pays exportateur des fertilisants et leader africain dans le domaine. A cela s’ajoutent les autres secteurs dont les deux pays ont déjà signé des accords pour les relancer de part et d’autre.
Je vous informe également qu’il a été décidé la création du Conseil d’Affaires et une Chambre de Commerce commune entre nos deux pays afin de faciliter les missions de prospection entre les opérateurs économiques des deux pays et saisir les opportunités d’affaires offertes au Burundi en l’occurrence l’exportation au Maroc du café et du thé burundais dotés d’une qualité remarquable et appréciée. Ainsi, lors de la table ronde organisée par le Burundi en décembre dernier, 27 hommes d’affaires et responsables marocains représentant des institutions publiques et privées ont entamé des discussions avec leurs homologues burundais afin de conclure plusieurs partenariats dans plusieurs secteurs. Quelques entreprises marocaines, après la tenue de la semaine économique du Burundi au Maroc en Avril 2024, désirent créer des antennes et filiales au Burundi afin de faciliter leurs transactions commerciales et il y a même des Burundais qui ont déjà créé leurs propres entreprises au Maroc et ont commencé à générer de la valeur ajoutée concrète et palpable.
L.R : Quel message souhaiteriez-vous adresser au peuple burundais et à ses dirigeants ?
(A.M) : Je souhaite au peuple burundais ami et frère le progrès, le développement la prospérité, la paix et la sécurité. Et je félicite le Gouvernement du Burundi pour toutes réformes entreprises au niveau de l’amélioration du climat d’affaires et la digitalisation des différentes procédures. Je réitère ainsi l’engagement de mon pays pour accompagner le Burundi dans sa vision prospère « Burundi, pays émergent en 2040 et développé en 2060 ». Le Maroc est prêt à soutenir cette vision et à intervenir pour soutenir tous les ministères sectoriels au Burundi.
Propos recueilli par
Moïse Nkurunziza