D’après le personnel soignant du CNPK (Centre neuro psychiatrique de Kamege), au Burundi, chaque jour, des milliers de femmes sont victimes des violences physiques, verbales ou psychologiques. Ces violences laissent des cicatrices parfois invisibles mais profondes qui se traduisent par la dépression, l’anxiété, les troubles du sommeil. L’année dernière, il y a eu au CNPK, deux mille vingt-trois consultations des femmes dépressives contre quatre-cent vingt-trois cas d’hommes dépressifs.
Dr Godelieve Nimubona révèle que, les violences conjugales sont parmi les facteurs majeurs qui exposent les femmes aux troubles mentaux. Ainsi, plusieurs patientes admises au CNPK souffrent de la conjugopathie. Cette dernière est un trouble psychique lié à une relation de couple insatisfaisante. Elle peut entraîner de la souffrance, violence ou de la rupture. La souffrance ressentie concerne les deux partenaires et celle-ci est auto-entretenue par le couple lui-même.
Deux mille vingt-trois consultations des femmes dépressives contre quatre-cent vingt-trois cas d’hommes dépressifs
Quand les femmes sont privées de leurs droits de plusieurs manières, frappées, abusées sexuellement par leurs propres maris, certaines cèdent à la dépression sévère. Ainsi, l’année dernière, il y a eu au CNPK, deux mille vingt-trois consultations des femmes dépressives contre quatre-cent vingt-trois cas d’hommes dépressifs.
« Les femmes sont plus susceptibles de tomber dans la dépression », a indiqué Dr Godelieve Nimubona, psychiatre au CNPK. « Le fait d’avoir une personnalité faible c’est-à-dire prédisposer à une maladie mentale explique pourquoi les personnes vivent un traumatisme similaire mais ne répondent pas au stress de la même façon », a-t-elle ajouté.
Manque de soutien familial parmi les causes des troubles mentaux
Parmi les victimes, il y a des femmes qui sont internées avec leurs nouveau-nés, généralement à cause de la psychose du post-partum. Un trouble psychique qui se manifeste pendant les premières semaines qui suivent l’accouchement résultant de conditions vécues durant la grossesse ou du manque de soutien familial.
« Quelques-unes confient qu’elles n’ont personne pour s’occuper d’elles après l’accouchement, leur préparer la nourriture par exemple. Bref, qu’elles n’ont pas de soutien de leurs maris même durant cette période avec tant de responsabilités », a dit une infirmière du CNPK.
D’après le personnel du CNPK, les femmes rurales subissent particulièrement différentes sortes de violences car elles ne sont pas sensibilisées à propos des droits de l’homme en général, de leurs droits en particulier. Ceci entraine un grand nombre de cas de maladies mentales chez elles, suite à l’incompréhension familiale, la pauvreté et aux médicaments qui sont chers.
Le manque de médicaments conduit ainsi à des rechutes. Cela fait basculer totalement la vie des femmes, car souvent, leurs conjoints se remarient. Plusieurs des victimes hospitalisées sont chassées de leurs ménages et retournent chez leurs parents. Ce qui aggrave leur chagrin mental.
Soyons prudents et indulgents à partir des paroles prononcées et actes posés
Uwimana Paula, psychologue au CNPK explique que tout acte portant atteinte à la dignité humaine, qu’il soit verbal ou physique a un impact négatif à long terme sur les pensées de la victime.
Les femmes qui subissent des viols conjugaux, les jeunes filles abusées sexuellement courent un grand risque de développer une maladie mentale à l’avenir. Ces mauvais souvenirs tournent en boucle dans la mémoire, et cela fait mal. Elle interpelle tout un chacun à être prudent et indulgent à partir des paroles qu’il prononce et des actes qu’il pose. Un stress permanent est un facteur favorisant la maladie mentale.
Eliane Nduwimana